Arcanes Mineures

Marguerite de Valois

Marguerite de Valois n’eut pas besoin d’attendre la réécriture de son histoire par Alexandre Dumas pour mener une vie romanesque. Déjà reconnue en son temps pour sa beauté et sa culture sans pareilles, celle que l’on n’appelait pas encore « la reine Margot » partageait avec son mari Henri de Navarre (le futur Henri IV) son goût pour les relations passionnelles et extra-conjugales. Hélas en ces temps les intrigues politiques et les élans du cœur faisaient rarement bon ménage. Pour sauver son frère Charles IX d’un complot dont il faisait l’objet, Marguerite ne dut-elle pas dénoncer son amant Boniface de La Môle, qui fut promptement condamné à la décapitation ? On dit qu’emplie de chagrin, elle racheta au bourreau la tête du supplicié et l’enterra dans le jardin de l’abbaye de Montmartre.

En février 1576, Henri de Navarre s’enfuit de Paris à l’occasion d’une partie de chasse en forêt de Senlis, se libérant ainsi de la tutelle forcée d’Henri III. Furieux de cette trahison, le roi et sa mère Catherine de Médicis refusent à Marguerite ses demandes répétées de rejoindre son époux afin de pouvoir maintenir le lien politique entre les deux familles. Excédée par cette situation, Marguerite décide de se rapprocher de son jeune frère François-Hercule d’Alençon, dont les ambitions pourraient l’aider à atteindre ses fins. Prétextant des problèmes de santé, elle organisa un voyage aux eaux de Spa qui lui permettrait à son retour de séjourner en son domaine de La Fère, où son jeune frère l’y rejoindrait.

La guerre était bien présente sur les terres de Flandres, et le voyage ne s’annonçait pas serein. On peut lire dans les Mémoires de Marguerite toutes les péripéties qu’elle dut traverser. Comment elle apprit que le roi Henri III, la soupçonnant de comploter contre lui, avait dévoilé son itinéraire et ses desseins à la fois aux armées espagnoles et huguenotes. Comment elle fut trahie d’abord par son secrétaire qui fit annuler son laisser-passer, puis par son trésorier qui fit saisir ses chevaux et son équipage en prétendant ne plus avoir d’argent pour payer le voyage. Comment Marguerite et sa suite sur leur parcours improvisé furent souvent reçues avec force hostilité par des populations qu’elle décrit comme simples et avinées. Comment, poursuivie par l’armée espagnole, elle se retrouva face à la porte close du donjon d’un château ami, le maître des lieux s’étant absenté et sa femme ne l’ayant pas reconnue. Comment enfin elle dut abandonner carrosse et bagages pour parcourir à cheval les dernières lieues qui la séparaient de La Fère, en évitant les armées huguenotes qui l’attendaient.

C’est donc avec grand soulagement qu’elle retrouva son frère François à La Fère, avec qui elle put passer les deux mois qui suivirent en toute quiétude. Ce dernier trouva le cadre à son goût, et toujours dans ses Mémoires, Marguerite lui fait dire : « O ma royne ! Qu’il fait bon avec vous ! Mon Dieu, ceste compagnie est un paradis comblé de toutes sortes de délices, et celle d’où je suis party un enfer remply de toutes sortes de furies et tourmens ».

C’est lors de ce séjour que Marguerite rencontra Jacques de Harlay, seigneur de Champvallon, avec qui elle entretint une relation passionnelle qui devait contribuer à sa déchéance. En effet quelques temps après son retour à Paris, à l’occasion d’un bal donné au Louvre, elle dut subir la fureur et les insultes du roi Henri III qui l’accusa de comploter avec François d’Alençon et même d’avoir donné un enfant à Champvallon en l’absence de son époux. Marguerite de Valois fut alors chassée de Paris et emprisonnée dans la forteresse d’Usson où elle demeura près de 20 ans.

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